Publié :mercredi 26 décembre 2012
Par EDVAC
Egypte : la constitution approuvée par 63,8% des votants
La Constitution controversée défendue par les islamistes au pouvoir en Egypte a été approuvée par près de 64% des votants, a confirmé mardi la commission électorale, au terme d'un référendum entaché selon l'opposition par des irrégularités.
Le projet de loi fondamentale a été approuvé par 63,8% des près de 52 millions d'électeurs inscrits, a annoncé à la presse le président de la commission Samir Aboul Maati, confirmant les chiffres officieux qui circulaient depuis la fermeture des bureaux de vote.
Le taux de participation avait été de 32,9%, a-t-il ajouté.
"Il n'y a pas de vaincu dans le résultat de ce référendum. Cette Constitution sera celle de tous", a réagi le Premier ministre Hicham Qandil, en appelant "toutes les forces politiques à coopérer avec le gouvernement (...) pour donner une chance à la nation de reprendre son souffle et pour que l'économie se rétablisse".
Des élections législatives doivent se tenir dans les deux mois suivant l'adoption de la Constitution.
Une fois la loi fondamentale ratifiée, le Sénat, dominé par les islamistes, récupèrera le pouvoir législatif jusqu'à l'élection d'une nouvelle chambre des députés. L'ancienne, où les islamistes étaient aussi majoritaires, avait été dissoute en juin.
Le référendum s'est déroulé sous haute tension les 15 et 22 décembre, après des semaines d'une grave crise politique et de manifestations rivales qui ont parfois dégénéré en violences meurtrières.
Pour le camp présidentiel, l'adoption d'une nouvelle Constitution permettra de doter le pays d'un cadre institutionnel stable après la période de transition tumultueuse qui a suivi la chute de Hosni Moubarak le 11 février 2011.
"Institutionnaliser l'instabilité"
L'opposition affirme que le texte, rédigé par une commission dominée par les islamistes, porte atteinte à certaines libertés fondamentales, ne représente pas la diversité de l'Egypte et ouvre la voie à une islamisation plus poussée de la législation.
Mohamed Badie, le Guide suprême des Frères musulmans dont est issu le président Mohamed Morsi, a félicité "le peuple égyptien pour l'approbation de la Constitution de l'Egypte de la révolution".
"Commençons tous à construire la renaissance de notre pays (...), hommes et femmes, musulmans et chrétiens", a-t-il ajouté sur son compte Twitter.
Mohamed ElBaradei, le coordinateur du Front du salut national (FSN), la principale coalition de l'opposition, avait estimé dans un entretien lundi avec la chaîne américaine PBS que la nouvelle Constitution allait "institutionnaliser l'instabilité".
Pour M. ElBaradei, la charte devrait être considérée comme un texte "intérimaire" jusqu'à la rédaction d'un nouveau projet consensuel.
Le FSN a dénoncé à plusieurs reprises des fraudes en faveur du "oui" et s'est engagé à "lutter pour faire tomber une Constitution injuste".
Sans mentionner les fraudes présumées, le président de la commission électorale a indiqué que l'instance avait reçu des plaintes et les avait toutes examinées, assurant que le processus s'était déroulé sous supervision judiciaire.
En Egypte, les élections doivent se dérouler sous la supervision des magistrats pour être valides. Or les ONG et l'opposition ont assuré que des personnes s'étaient fait passer pour des juges dans certains bureaux de vote.
"Rien n'a prouvé que dans un bureau de vote il y ait eu des gens n'appartenant pas à la magistrature. Tous ceux qui ont participé au processus étaient membres d'une des instances de la magistrature", a-t-il dit.
M. Aboul Maati a toutefois indiqué que les résultats de certains bureaux avaient été invalidés, pour certains parce qu'ils avaient fermé avant l'heure fixée par la commission.
La crise qui a secoué le pays ces dernières semaines est la plus grave depuis l'élection en juin de M. Morsi. Huit personnes ont été tuées début décembre dans des affrontements d'une rare violence devant le palais présidentiel au Caire.
L'Egypte fait aussi face à de graves difficultés économiques, avec un déficit budgétaire en hausse et des réserves de devises en berne. Lundi, l'agence de notation Standard & Poor's a annoncé qu'elle abaissait la note du pays à long terme de "B" à "B-" en raison des tensions politiques.